Hormones de croissance : rendent-elles le lait dangereux ?

Auteur Sandra Maribaux
Auteur : Sandra Maribaux, publié le 19/11/2014
Relu par le comité de rédaction

La somatotropine bovine recombinée injectée aux vaches fait-elle que le lait de ces animaux soit dangereux ? Voici les réponses.

Cela fait plus de deux décennies que l'Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) a approuvé l'utilisation des hormones de croissance synthétiques (dites recombinées) dans les vaches laitières.

Ce sujet reste pourtant controversé jusqu'à maintenant, et est remis sur table depuis la publication fin octobre 2014 d'une surprenante étude suédoise disant que boire du lait augmente le risque de fracture osseuse chez les femmes et diminue l'espérance de vie chez les hommes comme chez les femmes.

Nous reviendrons sur cette étude un peu plus bas, pour dénoncer son manque de fiabilité scientifique. Mais avant de poursuivre, nous allons vous expliquer brièvement l'hormone de croissance synthétique injectée aux vaches laitières.


> Hormone bovine de croissance : qu'est-ce que c'est ?

L'hormone de croissance est aussi appelée somatotropine ou somatropine.

L'hormone de croissance est une hormone protéique (de type protéines) produite dans l'hypophyse des animaux (y compris chez l'homme). Cette hormone est essentielle à la croissance normale, au développement et à l'entretien de la santé.

La somatrotropine bovine (STb) est techniquement une hormone polypeptidique (polypeptide constitué de 191 acides aminés, proche chimiquement de la prolactine). Rappelons que les chaînes de protéine les plus courtes sont appelées des peptides.

La somatotropine bovine (STb) est fabriquée de façon NATURELLE par les glandes pituitaires (hypophyses) des vaches laitières.

Cela veut dire que n'importe quel lait provenant de vaches (depuis des milliers d'années) contient de petites quantités d'hormones de croissance fabriquées naturellement chez ces animaux.

La STb aide les vaches laitières à produire du lait. La quantité de STb présente dans le lait de manière naturelle dépend du stade de lactation, de la parité, de la nutrition et de l'environnement dans lequel vit le troupeau.


Rappelons que l'hypophyse est une glande endocrine qui est placée dans une cavité osseuse appelée la fosse hypophysaire (qui est localisée dans l'os sphénoïde).

L'hypophyse sécrète des hormones qui régissent un grand éventail de fonctions organiques (notamment les hormones trophiques dont le rôle est de stimuler les autres glandes endocrines).

Une glande endocrine est un organe interne (une glande donc) qui fabrique puis introduit des hormones dans le flux sanguin. Ces hormones agissent ensuite sur des organes (ou sur des cellules) cibles lointains.


La STb (naturelle donc) est aussi appelée "hormone bovine de croissance".

Cette hormone naturelle peut être synthétisée (produite artificiellement) en employant l'acide désoxyribonucléique recombinant (aussi appelé "ADN recombiné", qui est créé en laboratoire).

La nouvelle hormone STb, obtenue après recombinaison et désormais artificielle, possède alors 3 noms possibles :
  • Somatotropine bovine recombinée (STbr),
  • Hormone bovine de croissance recombinée (HBCr),
  • Hormone artificielle de croissance.

Gardez cela en tête : ces 3 noms désignent la même chose.

Pour faciliter la lecture, RegimesMaigrir.com va utiliser le même nom dans la suite de cet article afin de désigner l'hormone bovine de croissance : somatotropine bovine recombinée (STbr).


> Rôle et historique de la STbr

Les producteurs injectent la STbr aux vaches pour accroître la quantité de lait produite. Ils le font depuis 60 ans environ.

Dès les années 1930, des scientifiques russes découvrirent qu'injecter les vaches des hormones de croissance extraites de glandes hypophysaires des vaches permet d'augmenter la production laitière.

Dans les années 1940, des chercheurs anglais essayèrent d'utiliser des extraits de glandes hypophysaires contenant de la STb pour hausser la production de lait par vache afin de résoudre le manque laitier pendant la Seconde Guerre mondiale. Cependant, l'essai concluant fût interrompu faute d'une quantité suffisante d'extraits.

Dans les années 1950, des scientifiques de l'université de Harvard (Etats-Unis) donnèrent aux enfants de la STb extraite de glandes pituitaires dans l'espoir de traiter le nanisme hypophysaire. Résultat : la STb n'eut aucun effet sur les humains.

Dans les années 1970, la technologie d'ADN recombinée est développée, rendant possible la production de grands volumes de STb purifiée sans grever les coûts.

En 1982, des études sur la STbr sont lancées pour analyser ses effets sur la production laitière chez les vaches en lactation.

En 1984, la FDA détermine que le lait et la viande issus des vaches traitées à la STbr sont dépourvus de risques pour la consommation humaine.

En 1990, la STbr est approuvée pour une utilisation sur les vaches laitières au Brésil et au Mexique.

En 1992, des études confirment que la STbr ne pose aucun danger à l'environnement. C'est donc une hormone écologique respectueuse de la biosphère.

Une étude réalisée par l'université Cornell (Etats-Unis) et publiée en 2008 dans la revue "Journal of Environmental Quality" a d'ailleurs trouvé que l'utilisation de la STbr pour augmenter la productivité laitière permet de réduire l'empreinte carbone de la production du lait, ce qui contribue à améliorer la durabilité agricole.

En effet, 6 vaches traitées à la STbr produiront la même quantité lactée que 7 vaches non traitées. Donc le fermier a moins besoin de nourriture, d'eau et d'autres ressources pour produire la même quantité de lait. Augmenter la productivité est l'élément clé dans la gérance environnementale.


En 1993, la FDA approuve officiellement l'utilisation commerciale de la STbr sous forme d'injection dans tous les animaux capables de produire du lait afin d'en augmenter la productivité.

Cette forme de STbr était commercialisée par l'entreprise américaine spécialisée dans les biotechnologies agricoles Monsanto, sous le nom de Posilac, depuis 1994.

Les études avaient montré que Posilac permettait d'augmenter la production de lait chez les vaches de 10 à 15% sur une période de 300 jours.

Quand une vache laitière donne naissance à son veau, elle produit progressivement plus de lait (de jour en jour) jusqu'à ce qu'elle atteigne son niveau de production maximal à environ 60 jours (par rapport au premier jour d'allaitement du veau). Ensuite, sa production laitière baisse de jour en jour.

La supplémentation en STbr (sous forme d'injection) est initiée entre le 57ème et le 70ème jour du cycle de lactation. Cette supplémentation aide les vaches à prolonger une amélioration du niveau de production de lait.

Une vache produit assez de lait en 1 jour pour en fournir au déjeuner de 125 écoliers. Cette même vache, supplémentée en STbr fournit assez de lait pour 145 écoliers.

Deux hommes mettent en place le dispositif qui permet d'extraire du lait des vaches laitières dans une salle très propre


Des rapports d'agriculteurs avaient souligné que l'usage de la STbr Posilac augmentait l'incidence de mammite (aussi appelée mastite, il s'agit de l'inflammation de la mamelle chez les mammifères), de fatigue et de problèmes de reproduction chez leurs vaches.

L'augmentation de la mammite était expliquée par l'utilisation élevée d'antibiotiques pour le traitement de diverses maladies, et le débarras de résidus antibiotiques (pour qu'ils ne soient plus présents dans le lait et les viandes). En effet, le lait produit par les vaches pendant la période de prise d'antibiotiques par les vaches n'est pas mélangé au lait produit en temps normal. Tant que la présence de résidus d'antibiotiques est détectée dans le lait d'une vache, son lait n'est pas utilisé.

Dès 1984, la FDA avait évalué et conclu que l'usage de la somatotropine bovine recombinée (STbr) sur les vaches laitières ne présente strictement aucun risque pour la santé des consommateurs ni pour la qualité nutritionnelle du lait ni pour la qualité des viandes provenant des vaches injectées (estimée équivalente à la qualité du lait et des viandes issues de vaches non traitées par la STbr).

Après cette conclusion de la FDA, en 1990, un groupe d'experts indépendants était réuni par les Instituts américains de la santé (NIH) pour évaluer le risque de la STbr.

Après des tests approfondis, ce groupe de spécialistes était parvenu à la même conclusion que la FDA : le lait et les viandes issus des vaches injectées de STbr est sans danger pour la consommation chez les humains.

Malgré les examens approfondis effectués avec soins par la FDA et les NIH, l'approbation de la STbr avait provoqué un débat important entre les groupes d'intérêts spéciaux, les médias et la littérature scientifique. Le débat consistait à savoir si le lait provenant des vaches ayant été reçu des injections de STbr pouvait causer des effets néfastes sur la santé à long terme.

Et ce débat dure depuis le temps, jusqu'à nos jours. Il faut dire que ce sujet est porteur. En parler fait vendre des journaux et des livres (beaucoup d'auteurs avaient surfé sur la vague anti-hormone bovine de croissance recombinée pour mieux se vendre).

Nous allons voir dans la partie suivante pourquoi il n'y a pas de risque sanitaire lié à la STbr sur les humains.


Remarque : depuis août 2008, c'est le groupe pharmaceutique américain Eli Lilly (le dixième du monde en chiffres d'affaires) qui produit et commercialise l'hormone STbr sous la marque déposée Posilac (après l'avoir racheté à Monsanto un peu plus tôt en 2008).

Les gens qui vous disent que c'est Monsanto qui est responsable de la STbr actuellement ne suivent donc pas l'actualité. Ils se décrédibilisent car cela montre qu'ils ne risquent pas de connaître les conclusions provenant d'autres études montrant l'innocuité de ce type de lait non plus.


> Le lait provenant des vaches injectées d'hormones de croissance STbr n'est PAS dangereux pour l'homme : les raisons

Après 1990 (et l'approbation de la STbr par la FDA et par les NIH), de multiples études ont montré que le lait maternel (chez les humains) et le lait bovin contient toujours de petites quantités d'hormone de croissance (peu importe que la vache ait été injectée de STbr ou pas).

Après ingestion, l'hormone de croissance (tout comme n'importe quelle autre protéine présente dans le lait) est digérée et décomposée en acides aminés et peptides.

Il n'existe AUCUNE donnée pour suggérer que l'hormone de croissance présente dans le lait peut survivre à la digestion, ou qu'elle peut produire des fragments peptidiques uniques qui pourraient avoir des effets biologiques.

Même si la STb était absorbée intacte, les récepteurs de l'hormone de croissance chez les humains ne reconnaissent pas la STb produite par les vaches, et donc la STb provenant du lait bovin ne peut pas produire des effets chez les humains.

Des études de toxicité orale chez les rats ont montré que la STbr n'est pas active par voie orale chez ces animaux. Cela veut dire que cette hormone ne peut pas être absorbée par l'organisme via la digestion.

D'autres études plus globales ont montré que la somatotropine bovine recombinée (STbr) ne peut pas être absorbée intacte à travers l'intestin.

Elles ont aussi démontré que même si de petites quantités hormonales de STbr venaient à être absorbées, il n'existe aucun récepteur pour les hormones bovines de croissance dans l'organisme humain.

Ces recherches scientifiques avaient aussi observé que l'intestin des très jeunes nourrissons est un organe immature qui peut absorber les protéines et les laisser intactes en petites quantités.

Mais les chercheurs avaient aussitôt précisé qu'il n'y avait strictement aucun risque pour ces jeunes bébés s'ils ne boivent pas de lait cru (manger cru présente plusieurs bienfaits mais toujours à condition d'être prudent). En effet, la pasteurisation désactive et détruit totalement les hormones bovines de croissance présentes dans le lait.

Les laits maternisés en poudre (à donner en biberon) reçoivent par ailleurs des traitements de chaleur intense. Et il n'y a aucune trace de STb de trouvable dans les laits maternisés.


D'autres préoccupations concernent le facteur de croissance 1 analogue à l'insuline (aussi nommée IGF-1, acronyme provenant de l'anglais "insulin-like growth factor-1", ou somatomédine C).

L'IGF-1 joue un rôle important dans la croissance des tissus et dans le développement.

Plusieurs études ont montré une association entre l'IGF-1 et le risque de cancer. Des niveaux sériques d'IGF-1 accrus peuvent être liés à un risque supérieur de cancer du sein, du côlon, de la prostate.

Des études ont aussi montré que la somatotropine bovine recombinée (STbr) produit une présence légèrement accrue d'IGF-1 dans le lait de vache.

La concentration d'IGF-1 augmente de 2 à 5 nanogrammes par millilitre (ng/ml) chez les vaches injectées de STbr, tandis que le lait de vache non traité par la STbr présente une concentration de 3 à 10 ng/ml et que le lait humain contient 1 à 3 ng/ml.

Rappel : 1 nanogramme = 1 milliardième de gramme (on divise 1 gramme en 1 milliard de parties, et 1 nanogramme représente l'une de ces parties).

Dans le corps humain, l'IGF-1 est produit naturellement. Il est présent dans la salive, le liquide biliaire, le suc pancréatique, les sécrétions de la muqueuse intestinale, le foie et les tissus extra-hépatiques.

Il faut tout d'abord savoir que la quantité d'IGF-1 consommée quotidiennement à partir des produits laitiers est minuscule par rapport à la production endogène naturelle dans le corps humain.

Ensuite, il faut garder en tête que l'IGF-1 ne peut PAS être absorbé par l'estomac ou l'intestin. Donc il n'est pas capable d'échapper à la protéolyse pendant le transit intestinal.

Rappelons que la protéolyse est l'hydrolyse des protéines sous l'action des enzymes. Concrètement, la protéine se décompose en plusieurs morceaux.

Et même si de petites quantités d'IGF-1 venaient à être absorbées par l'intestin et à être transmises à la circulation sanguine, elles contribueraient à moins de 0,06% de la production totale d'IGF-1 par jour par le corps humain.

L'IGF-1 n'est pas dénaturée par la pasteurisation. Alors la consommation de lait provenant de vaches laitières traitées par la STbr augmentera l'apport oral journalier d'IGF-1, mais les concentrations sériques ne seront PAS affectées grâce à l'effet dénaturant survenu dans l'estomac et l'intestin (effet évoqué plus haut).

Cela pourrait être un souci éventuellement chez les nourrissons en raison de la perméabilité de leur intestin. Toutefois, la plupart des très jeunes bébés sont nourris au sein ou par des laits maternisés qui ne contiennent que des quantités infimes d'IGF-1.

Il faut aussi savoir que le traitement par chaleur intense utilisé pendant la fabrication des laits maternisés destinés aux nourrissons désactive d'ores et déjà environ 90% des IGF-1.


> Si le lait n'est PAS dangereux à cause de l'hormone bovine de croissance recombinée, dans ce cas, pourquoi cette hormone est-elle interdite dans certains pays ?

Le Posilac (marque commerciale de l'hormone STbr, qui est vendue par Eli Lilly comme expliqué plus haut et non par Monsanto) est interdit d'utilisation au Canada, en Australie, en Nouvelle-Zélande, au Japon, en Israël depuis les années 2000 et un peu plus tôt.

L'Union européenne a déclaré depuis 1990 que l'usage de la STbr ne cause pas de problèmes de santé. Mais en 1993, un moratoire a été placé sur son utilisation par ses 27 pays membres dans l'attente des recommandations d'une commission scientifique qui devaient être formulées en 1994.

Rappelons qu'un moratoire est un mot qui signifie une décision d'accorder un délai ou une suspension volontaire d'une action.

En 1994, un rapport d'une commission scientifique de l'Union européenne a conclu que l'emploi de la STbr augmente sensiblement les problèmes de santé survenus chez les vaches laitières : boiterie, mammite, réactions locales aux injections, perturbation du bien-être des animaux et troubles reproductifs.

Et pour préserver la santé et le bien-être de ces vaches laitières, cette commission scientifique avait recommandé de ne pas utiliser la STbr.

Pour résumer, même si les pays listés plus haut avaient officiellement déclaré que la STbr n'occasionne aucun effet secondaire négatif pour la santé humaine, ils avaient suivi les recommandations de la commission scientifique pour interdire la STbr afin de ne pas nuire à la santé et au bien-être des vaches laitières, et non parce que cette hormone nuit à la santé de l'homme.

En 1998, le Canada avait constitué un groupe d'experts pour examiner l'innocuité du lait provenant de vaches traitées à la STbr pour l'homme.

Le groupe d'experts canadiens avait conclu qu'il n'y avait pas d'augmentation de la concentration totale d'hormone de croissance dans le lait issu de vaches injectées de STbr, et donc aucun risque pour la santé humaine.

Ce groupe d'experts avait aussi conclu que la STbr augmente la production d'IGF-1 chez les animaux receveurs, et qu'elle augmente les concentrations d'IGF-1 dans les produits alimentaires provenant des bétails traités à la STbr.

Mais surtout, le groupe de spécialistes avait conclu qu'il n'y a aucune base biologique pour conclure que, chez les humains potentiellement exposés à l'IGF-1 à cause des viandes ou du lait de vaches injectées de STbr, des changements puissent survenir et provoquer : une réponse immunitaire, un changement de la croissance intestinale néonatale et du développement néonatal, un risque de cancer.

Le gouvernement du Canada avait interdit la vente de STbr en 1999, après les conclusions de ce groupe d'experts, non pas parce que le lait ou la viande provenant de vaches traitées à la STbr représentait un danger pour l'homme, mais parce que cette hormone pouvait nuire à la santé des vaches (le Canada avait donc préféré - là aussi - suivre les recommandations du rapport fait en 1994 par la commission scientifique de l'Union européenne, rapport évoqué un peu plus haut).


Les Etats-Unis et beaucoup d'autres pays du monde n'ont pas interdit la somatotropine bovine recombinée (STbr) à la vente. La FDA n'exige pas non plus d'étiquette spéciale pour le lait et les laitages produits à partir de vaches traitées à la STbr.

La FDA sait que tous les laits contiennent l'hormone bovine de croissance, donc que le lait et les laiteries ne peuvent pas être étiquetés "sans STbr". La FDA a décidé qu'une telle étiquette pouvait provoquer la confusion chez les consommateurs et être trompeuse.

Le gouvernement américain et d'autres pays qui autorisent la STbr ont toujours insisté par des campagnes d'information que tous les produits laitiers (y compris le lait) vendus sur leur sol contiennent les mêmes nutriments et ne présentent aucun danger pour la consommation humaine, que ces produits aient été fabriqués à partir de laits issus de vaches traitées aux hormones de synthèses ou non.

Une femme sourit tout en buvant un verre de lait


> L'étude suédoise sur les méfaits du lait est-elle sérieuse ?

Revenons à cette étude qui fait que beaucoup de gens profitent de l'occasion pour descendre le lait en général et dire qu'elle nuit à la santé humaine, et pour dire que cela aurait été pire avec le lait provenant de vaches traitées à la STbr.

Cette étude, publiée dans la revue British Medical Journal BMJ le 28 octobre 2014, affirme que, contrairement aux recommandations gouvernementales, la consommation de lait augmente les fractures chez les femmes et l'espérance de vie à la fois chez les femmes et les hommes.

Les chercheurs avaient suivi plus de 100 000 hommes et femmes en Suède entre 11 et 20 ans et trouvé que le lait, mais pas le fromage ou le yaourt, pourrait être dangereux pour la santé sur les deux points cités précédemment.

L'étude a trouvé une corrélation entre la consommation de 3 verres (ou plus) de lait par jour, et une augmentation de la mortalité. Par exemple, les gros buveurs de lait étaient plus exposés au cancer et aux maladies cardiovasculaires que les non buveurs.

Les scientifiques ont émis l'hypothèse que la raison pourrait être le stress oxydatif induit par le D-galactose, un sucre simple qui est créé lorsque le lactose (le sucre naturel du lait) se décompose dans le corps.

Dans des études menées sur des animaux, l'injection des souris avec du D-galactose a conduit à l'inflammation chronique, à la neurodégénérescence, et à une diminution de la réponse immunitaire.

Comme vous le savez sûrement, les gouvernements de tous les pays occidentaux recommandent de consommer 3 portions de produits laitiers par jour (l'équivalent de 3 verres de lait) dans le cadre d'une alimentation équilibrée.

Alors que devrait faire un consommateur face aux conclusions de cette surprenante étude suédoise, qui se pose en contradiction flagrante avec de très nombreuses autres études sur le lait (qui en disent du bien) ?

Tout d'abord, vous devez savoir que cette étude suédoise est une étude observationnelle. Les chercheurs ont demandé aux participants de répondre à un questionnaire sur la fréquence alimentaire.

Or ce type d'étude a tendance à être extrêmement imprécis. Et tous les scientifiques le savent. D'ailleurs, même les auteurs de l'étude ne s'en cachent pas. Ils soulignent à la toute fin que leur étude est purement observationnelle, et n'a pas pour objectif de tirer des conclusions causales.

C'est vraiment dommage pour les gens qui s'étaient empressés de répandre la nouvelle partout sur les réseaux sociaux comme facebook pour dire "voyez que le lait est nocif !". Ils seront très déçus d'apprendre que même les auteurs de cette étude suédoise qu'ils ont tenté de médiatiser (auprès de leurs cercles d'amis) disent qu'il ne faut PAS tirer la conclusion que le lait est la cause de ces problèmes de fracture et de cette baisse de l'espérance de vie, et que c'était juste une observation.

Dans cette même étude observationnelle et pas du tout fiable, les données ont par ailleurs montré que les gens qui buvaient une grande quantité de lait avaient consommé 500 calories de plus par jour que leurs homologues sur la même période, mais leur poids moyen est resté le même (entre les 2 groupes de population). Quel manque de fiabilité !

Les gens qui participent à ce genre d'étude observationnelle ne se souviennent pas toujours des quantités consommées (le nombre de verres de lait bus par exemple) ni de la fréquence. Ils peuvent souvent déclarer par erreur (involontairement). C'est normal, les humains ne sont pas des robots pour se souvenir de tout avec exactitude.

Quand les points de données sont si inexacts, cela peut conduire à des conclusions erronées.

Il y a aussi des explications beaucoup plus plausibles pour comprendre pourquoi le lait provoque "plus de fractures". Il se peut très bien que les gens qui se savent avoir un grand risque de fracture (à cause d'un antécédent familial ou d'un diagnostic d'ostéoporose précoce, ou d'une chirurgie bariatrique) pourraient être tentés de boire beaucoup de lait en pensant que cela les protégerait complètement du risque.

Or si ce risque est déjà trop élevé, une surconsommation de lait n'aurait pas pu immuniser ces personnes-là des fractures. Le lait aide à prévenir l'ostéoporose certes (des études sérieuses l'ont montré), mais chez la personne moyenne, beaucoup moins chez la personne prédisposée.

Alors si le lait est juste neutre, une étude comme celle des chercheurs suédois peut forcément trouver une corrélation parce que se sachant avoir un risque de fracture amène nécessairement les gens à boire plus de lait.

L'autre problème de cette étude suédoise très tirée par les cheveux est que le mécanisme proposé par les chercheurs est douteux.

Les auteurs de l'étude ont émis l'hypothèse que les dangers du lait viennent - comme nous l'avons dit plus haut - du D-galactose. Ils affirment qu'il y a beaucoup plus de D-galactose dans le lait que dans les produits fermentés (comme le yaourt ou le fromage).

Et c'est là que le bât blesse. Les scientifiques ont déjà prouvé que le sucre du lait (le lactose) est fait à partir de deux blocs constituants : le galactose et le glucose.

Les gens qui peuvent digérer le lait décomposent le lactose en ces 2 sucres plus simples. Il peut y avoir quelques processus de fermentation qui décomposent aussi le galactose, mais au moins une étude a déjà montré qu'il y a du galactose dans le yaourt.

Or il n'est pas clair dans l'étude suédoise si quelqu'un a mangé 3 portions de yaourts par jour. Alors la différence peut provenir de la modération de la part des consommateurs de yaourt.


Il faut savoir aussi que les avantages sanitaires liés à la consommation du lait sont bien documentés par des décennies de recherche sur la nutrition, et sont soutenus par la communauté de la nutrition et de la science.

L'étude suédoise en question manque totalement de fiabilité scientifique. Elle est remplie de confusions provoquées par les données contradictoires (liées au mode de réponse au questionnaire) et a du coup une portée très limitée. En somme, nous ne pouvons tirer aucune conclusion valide à partir d'elle.

L'ensemble des données scientifiques disponibles ne soutient aucunement la conclusion de cette étude. Elles indiquent plutôt que le lait est bénéfique pour la santé, pour conserver un poids juste, et pour réduire le risque de plusieurs problèmes de santé importants (comme les maladies cardiovasculaires, l'hypertension, le cancer colorectal). Jamais une étude sur le lait n'avait montré un effet négatif sur l'espérance de vie.

Le point de vue de RegimesMaigrir.com sur la question est simple. Si vous aimez le lait et les produits laitiers, continuez à les consommer (et ne tenez surtout pas compte de cette étude suédoise qui manque totalement de crédibilité).

Et si vous n'aimez pas le lait ou êtes intolérants au lactose, ne vous forcez pas. Veillez simplement à obtenir vos nutriments essentiels à partir d'autres aliments nutritifs. Le lait n'est pas la seule source de calcium dans le monde, il est juste plus pratique à consommer (pour obtenir ce minéral) et est plus médiatisé que d'autres aliments (contenant aussi du calcium).

En revanche, les personnes faiblement intolérantes au lactose peuvent la plupart du temps consommer des yaourts sans souci. Le yaourt est rempli de vertus.


> Le saviez-vous ?

  • La STb (à partir de laquelle la STbr est dérivée) est présente naturellement dans le lait à un niveau minuscule. Sa concentration est équivalente à une goutte de STb par 83 280 litres de lait ! Cette concentration n'est pas plus élevée dans le lait provenant de vaches traitées à la STbr.

  • Des rumeurs disent que la STbr provoque le cancer du sein. Or boire du lait n'augmente pas ce risque cancéreux (peu importe que le lait soit bio, normal ou provenant de vaches traitées à la STbr).

    Au contraire, le lait contient de nombreux éléments qui sont capables de protéger du cancer du sein, comme l'acide ruménique, l'acide trans-vaccénique, l'acide butyrique, les acides gras à chaîne ramifiée, le petit-lait (plus d'infos ici), le calcium et la vitamine D.

    Depuis l'approbation de la STbr par la FDA en 1993, il y a eu un déclin du taux de cancer du sein aux Etats-Unis.

  • D'autres rumeurs disent que la STbr provoque la puberté précoce chez les filles. Ces rumeurs sont infondées (comme tant d'autres sur le liquide lacté).

    En effet, beaucoup de facteurs influent sur l'âge de la puberté chez les adolescents. Mais des aliments précis ou des substances non-nutritives dans les aliments (comme les hormones) ne sont PAS associés à des changements de l'âge auquel la puberté survient.

    Puisque tous les types de lait (y compris celui issu des vaches supplémentées à la STbr) possèdent la même composition. Il n'y a aucune différence dans les produits laitiers provenant des vaches traitées à la STbr qui puisse affecter l'âge auquel commence la puberté.

    Le poids corporel et la hauteur de plus en plus élevés chez les garçons et les filles depuis quelques décennies, permis par une santé et une nutrition meilleures, sont associés à une apparition précoce de la puberté (en plus de l'obésité qui pourrait constituer un autre facteur).

    Tandis que la malnutrition, la haute altitude, les infections chroniques, les maladies chroniques (comme l'inflammation de l'intestin et la fibrose kystique), produisant un impact négatif sur le statut nutritionnel et la prise de poids, sont toutes associées à un retardement de la puberté.


> Synthèse

Beaucoup de gens critiquent l'hormone de croissance STbr (somatotropine bovine recombinée) pour ses dangers pour la santé humaine, sans comprendre finalement que cette hormone ne pose pas de danger à l'homme (mais à la santé des vaches laitières).

La paranoïa est savamment entretenue par les médias (notamment les associations anti-hormones de synthèse) qui savent pourtant pertinemment qu'aucune étude scientifique valide a pu montrer que le lait (ou les viandes) provenant de vaches traitées à la STbr puisse poser un seul danger aux humains.

Une trentaine de pays dans le monde (notamment les 27 pays de l'Union européenne) n'approuvent pas la vente et l'utilisation de l'hormone bovine de croissance recombinée (autre nom de la STbr) sur leur sol, non pas parce qu'elle est dangereuse pour l'homme, mais parce qu'elle perturbe la santé et le bien-être des vaches laitières.

L'étude suédoise publiée fin octobre 2014, disant que le lait provoque plus de fractures et raccourcit la durée de vie, est une étude observationnelle. De l'aveu des auteurs de l'étude, leur étude n'a pas du tout l'objectif de tirer des conclusions causales. C'est juste une observation (faite à partir de données déclaratives sur questionnaires, qui sont erronées).

N'ayez donc pas peur de continuer à boire du lait si vous le faites actuellement. Prenez 3 portions de produits laitiers par jour pour manger équilibré et conserver une bonne santé.


> Sources

  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/1779049
  • http://www.domesticanimalendo.com/article/S0739-7240(08)00006-4/abstract
  • http://goo.gl/FToKEE
  • http://goo.gl/a4jZsv
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/14620861
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/10435273
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/2341916
  • http://www.jstor.org/stable/2877952
  • http://www.jacn.org/content/24/suppl_6/556S.long
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22682634
  • http://goo.gl/ISTCK4
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK15180/
  • http://ec.europa.eu/food/fs/sc/scah/out21_en.pdf
  • http://web.archive.org/web/20080110050349/http://www.hc-sc.gc.ca/ahc-asc/media/nr-cp/1999/1999_03_e.html.
  • http://goo.gl/d8w5Or
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC333498/
  • http://www.hc-sc.gc.ca/dhp-mps/vet/issues-enjeux/rbst-stbr/rep_rcpsc-rap_crmcc-fra.php
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/9438850
  • http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16779988
  • http://www.pnas.org/content/105/28/9668.full
  • http://www.bmj.com/content/349/bmj.g6015


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Photo portrait de l'auteur Sandra Maribaux
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